30 mars 2015

UniFrance Films dévoile un rapport sur les marchés numériques pour les films français et européens


VOD, SVOD... Un rapport étudie ces plateformes de diffusion numérique pour mieux en définir les enjeux et le potentiel dans un contexte de croissance pour le cinéma français et européen.

UniFrance films a confié à EY une étude publiée aujourd’hui 25 mars 2015 (dévoilée hier à Bruxelles en avant-première en présence de Jean-Paul Salomé, président d'UniFrance films et du réalisateur Michel Hazanavicius), portant sur les nouveaux marchés du cinéma français et européen, à l’heure du développement de la vidéo à la demande (VOD) et de la vidéo à la demande par abonnement (SVOD). L’objectif de cette étude est d’analyser le potentiel économique des films français et européens sur ces nouvelles plateformes de diffusion numérique dans une dizaine de territoires (Etats-UnisRoyaume-UniAllemagneItalieEspagnePologneJaponChineBrésil et Afrique) et de proposer des recommandations pour saisir toutes les opportunités de ce nouveau marché.

En 2020, le potentiel du marché de la VOD et de la SVOD, sur les dix territoires analysés, toutes cinématographies prises en compte, est estimé à 13 milliards d’euros (2/3 du marché global), d’où une estimation du marché mondial à 20 milliards d’euros.


Quelles opportunités pour le cinéma français et européen ?

Dans un contexte globalement favorable, l’étude EY estime que le marché international de la VOD et SVOD atteindrait 75M€ en 2020. Les revenus issus de la VOD et SVOD sont aujourd’hui encore peu significatifs pour les sociétés d’exportation françaises : moins de 5% de leur chiffre d’affaires à l’export. Pour elles comme pour leurs homologues européens, saisir les opportunités offertes par les nouvelles plateformes de diffusion numérique est un enjeu essentiel.

Pour Jean-Paul Salomé, Président d’UniFrance films, "il est important pour les producteurs et vendeurs français d'anticiper les revenus futurs de la VOD et de la SVOD pour se positionner sur ce secteur dont le développement sera essentiel à la croissance du cinéma."

VOD et SVOD : un marché global de 8 milliards d’euros

Le marché total des nouvelles plateformes numériques dans les territoires analysés par l’étude EY s’élève à 8 milliards d’euros en 2013.

Les États-Unis représentent plus de la moitié (59%) de ce marché, soit 4,7 milliards d’euros. Sur ce territoire, la part du numérique y dépasse désormais la part de la vidéo physique, signe d’une transformation numérique déjà bien amorcée. Plus significatif peut-être, depuis 2012, ce sont les services de SVOD, et donc de streaming, qui tirent la croissance de la vidéo à la demande, atteignant une part de marché de 53% au premier semestre 2014.

Si la place des Etats-Unis est prépondérante, la valorisation des films français et européens sur les principales plateformes américaines reste un enjeu important. En effet, la part de marché des films français actuellement sur Netflix, Hulu Plus et iTunes oscille entre 2 et 5%.

Dans ce contexte, le marché européen, qui représente 24% (1,9 milliard d’euros) du marché, offre une capacité de valorisation essentielle.
En Europe, si la part des services de vidéo numérique augmente de manière significative (43% entre 2012 et 2013), le marché de la vidéo physique représente encore 80% du marché. On constate cependant que, parmi les plateformes numériques, et de la même façon qu’aux Etats-Unis, les services de SVOD se développent bien plus rapidement avec un taux de croissance annuel de 126% entre 2009 et 2013.

Danielle Attias, Senior Manager chez EY, conclut l’étude par une série de préconisations. “Il existe plusieurs leviers qui pourront contribuer à développer l’accès à l’offre légale pour un nombre croissant d’utilisateurs au niveau mondial, explique-t-elle, comme soutenir les efforts de promotion pour l’exploitation VOD/SVOD, adapter les aides publiques à l’export ou encore étudier de nouveaux modèles de distribution en fonction des spécificités de chaque marché.”

La synthèse de l'étude peut téléchargée en cliquant ICI.
L’intégralité de l’étude peut être téléchargée en cliquant ICI.

Source : Unifrance

17 mars 2015

Le BCTQ présente une nouvelle étude économique sur la filière audiovisuelle québécoise


Le Bureau du cinéma et de la télévision du Québec présente l’étude portant sur l’importance économique de la filière audiovisuelle du Québec.

Le document, préparé par la firme KPMG-SECOR, illustre clairement que la filière représente un véritable écosystème dont les diverses composantes se complètent et se renforcent, ce qui confère à la province une industrie dynamique, des ressources compétentes et un positionnement concurrentiel reconnu internationalement.

C’est dans ce contexte que le BCTQ a souhaité documenter l’importance économique de la filière actuelle et comparer le soutien par crédit d’impôt à l’aide d’une étude rigoureuse et factuelle qui met en lumière l’ensemble des aspects-clés de la dynamique industrielle et concurrentielle.

Enfin, au-delà des comparatifs, le document propose des pistes de développement permettant à terme, des entrées de fonds significatives dans l’économie québécoise assurant à la fois la croissance et la pérennité de la filière audiovisuelle du Québec. 

Pour consulter le document, cliquez ICI.


















Source : BCTQ

12 mars 2015

Parlons télé : le CRTC annonce des mesures visant à soutenir la création de contenu par les Canadiens

Discours de Jean-Pierre Blais à la Cercle canadien d'Ottawa à propos de Parlons télé et de l'avenir du contenu produit par les Canadiens


Ottawa (Ontario)
Le 12 mars 2015
Jean-Pierre Blais, Président
Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes
Priorité à l'allocution
Bonjour.
C'est un plaisir de m'adresser au Cercle canadien. Pendant longtemps au début du 20e siècle, à l'époque où la parole était le principal moyen d'expression, c'est ici que les gens venaient pour énoncer des idées d'importance nationale. Lorsque les dirigeants prenaient la parole au Cercle canadien, les gens prenaient note car on allait y tenir des propos de valeur. Et cette fière tradition se poursuit au 21e siècle.
Certains parmi vous ne réalisent peut-être pas qu'il existe un lien, pour ainsi dire, entre le Cercle canadien et le CRTC. Graham Spry, dont plusieurs se souviendront comme un défenseur passionné de la radiodiffusion publique au Canada, est devenu secrétaire du Club en 1926.
À l'extérieur du Club, en 1932, son travail a mené à la création de la Commission canadienne de radiodiffusion, précurseur immédiat de CBC/Radio-Canada, à l'époque du gouvernement de R. B. Bennett.
À ce moment-là, la Commission jouait un double rôle. Elle créait et diffusait des émissions, tout en voyant à la réglementation de l'industrie canadienne de la radiodiffusion. En ce sens, certains pourraient la considérer aussi comme un précurseur du CRTC d'aujourd'hui.
Bien sûr, Spry était un chaud partisan des recommandations de la Commission Aird, qui avait proposé la mise sur pied d'un système national de radio publique au Canada.  Deux décennies plus tard, Robert Fowler a donné suite aux travaux de la Commission Aird. Il s'est penché sur les rôles que pourraient jouer les radiodiffuseurs publics et privés en vue de financer le système canadien de radiodiffusion. Parmi ses recommandations, l'une visait à ce que le gouvernement crée un organisme de réglementation indépendant afin de superviser la radiodiffusion — l'institution que j'ai le privilège de diriger aujourd'hui.

Un changement fondamental

Affirmer que les choses ont excessivement changé depuis l'époque de Graham Spry et de Robert Fowler serait d'une évidence certaine. Au fil du temps, la réglementation s'est complexifiée, les médias se sont intégrés davantage et les joueurs sont devenus plus sophistiqués. En particulier, l'évolution technologique a été intense et a entraîné des changements profonds. La radio a mené à la télévision, la télévision a mené à la distribution par câble et par satellite, et Internet à large bande a tout changé.
Actuellement, il s'opère un changement fondamental dans le paysage télévisuel. Les gens regardent le contenu sur les appareils qui leur conviennent le mieux, et d'une façon et au moment qui leur conviennent le mieux. Résultat : le rôle du radiodiffuseur évolue. Dans le passé, un radiodiffuseur était un intermédiaire entre les producteurs de contenu et les téléspectateurs. De nos jours, cette fonction n'est plus aussi essentielle car les gens qui veulent regarder du contenu peuvent choisir parmi des centaines de stations de télévision et un nombre incalculable de chaînes Internet pour trouver ce qui les intéresse.
Même le rôle du téléspectateur est en train de changer. D'un récepteur passif de contenu télévisuel, il devient en quelque sorte un agrégateur actif et autonome. La question fondamentale à laquelle cette personne doit répondre chaque soir n'est plus « qu'est-ce qu'on présente» mais bien « qu'est-ce que j'ai envie de regarder? »
Quand vous retirez le quand et le comment de l'expérience de visionnement, il ne vous reste plus que le quoi. Et le quoi — le contenu, autrement dit — n'a jamais été aussi important.
L'avenir de la télévision réside dans le contenu, ce n'est pas nouveau. L'idée que le « contenu est roi » a été soulevée tellement souvent que c'est devenu un cliché. Même Robert Fowler a écrit dans son rapport, en 1965, que « la seule chose qui importe vraiment en matière de radiodiffusion, c'est le contenu; tout le reste n'est que gestion courante ». L'élément vraiment nouveau, celui qui change les règles du jeu, c'est l'effet direct des réseaux à large bande qui facilitent la distribution du contenu audiovisuel. Ces réseaux permettent aux gens qui visionnent du contenu de passer outre aux détenteurs traditionnels du contenu, les réseaux de radiodiffusion.
Oui, le contenu demeure roi; mais il y a une vérité incontestable : le téléspectateur est empereur.

L'ère de l'abondance

Pensez-y : pour chaque heure où un Canadien est éveillé, il peut choisir parmi plus de 1 300 heures de télévision traditionnelle, si on tient pour acquis qu'il ne fait rien d'autre que dormir, écouter la télévision et s'adonner à du multitâches pour tout le reste. De plus, on estime que 300 heures de vidéo sont téléversées sur YouTube chaque minute de chaque jour de chaque mois.
Aujourd'hui, il y a 32 % plus de productions télévisuelles et cinématographiques canadiennes qu'en 2003, au moment où Clifford Lincoln a signé son rapport parlementaire sur la radiodiffusion intitulé Notre souveraineté culturelle.
Mesdames, Messieurs, au chapitre du contenu vidéo, nous vivons dans une ère d'abondance. Le contenu est partout dans Internet et à la télévision. Et il est à notre disposition à toute heure du jour ou de la nuit, sur l'appareil de notre choix. L'ironie dans tout cela, c'est qu'il s'agit de notre plus grand défi. Que nous soyons créateurs, distributeurs, téléspectateurs ou même membres d'un organisme de réglementation, l'idée pour nous tous est de s'adapter à la vie dans cette nouvelle ère. Car ce ne sera pas facile.
Le CRTC évolue. Pour paraphraser la célèbre remarque de John F. Kennedy en 1962, « nous choisissons de faire cela non pas parce que c'est facile, mais justement parce que c'est difficile ».
Ainsi, nous supprimons les obstacles à l'innovation qui ont gêné le progrès des radiodiffuseurs et des producteurs. Ce faisant, nous ouvrons la voie aux nouvelles idées — comme la découverte du contenu — et aux nouvelles approches par rapport à des concepts comme celui du contenu canadien.
Retournons pour un moment aux années 20, à Londres, en Angleterre. Graham Spry était alors un boursier de Rhodes à l'Université d'Oxford; c'est l'époque aussi où, pour la première fois, on a songé à instaurer des quotas pour les films.
À la Conférence impériale de 1926, les Britanniques ont proposé à leurs colonies, y compris le Canada, l'Australie, Terre-Neuve et l'Afrique du Sud, un système de certification pour les films, lequel était basé sur l'attribution de points en fonction du caractère britannique de la production — tant de points pour le scénariste, tant de points pour le réalisateur, tant de points pour les acteurs, et ainsi de suite. Le nouveau système avait pour objectif de protéger les films britanniques contre l'afflux de films produits par les studios américains intégrés verticalement.
Le sentiment protectionniste qui régnait à la Conférence impériale vous semble peut-être familier. Dans les années 1960, tout comme à l'époque où Graham Spry menait une campagne en faveur d'un radiodiffuseur public national, les Canadiens s'inquiétaient qu'une vague télévisuelle géante nous arrive des États-Unis, et engloutisse nos producteurs et notre contenu.
C'est pourquoi, en 1968, le Parlement a créé le CRTC et lui a confié le mandat d'appliquer la Loi sur la radiodiffusion. Il en a suivi une toile complexe de règlements conçus afin de faciliter la création et la distribution de contenu produit par des Canadiens. Et aujourd'hui, près de 90 ans plus tard, la définition du contenu canadien renvoie encore à un système de points élaboré la même année où l'Allemagne a joint la Société des Nations et où l'affaire King-Byng a été résolue.
Cela dit, je ne veux pas être trop critique envers le passé. Pendant des années, ce modèle a réussi à atteindre ses objectifs. Les règlements, qui agissent en appui à la télévision canadienne, ont contribué à créer une industrie prospère qui emploie près de 60 000 Canadiens. Chaque année, le soutien accordé aux productions canadiennes de télévision s'élève à plus de 4 milliards de dollars. Ces fonds ont été investis dans des émissions vendues à l'échelle mondiale et vues par des auditoires ici et partout dans le monde.
Certains vous diront, comme ils l'ont fait lors de notre audience publique l'automne dernier, que tout va bien et qu'il n'y a pas lieu de procéder à de grands changements. Aujourd'hui, je suis ici pour vous dire que ce modèle ne fonctionnera plus. En cette ère d'abondance, où les gens peuvent choisir parmi une multitude d'émissions sur autant de plateformes, les quotas sont l'équivalent de vouloir résoudre la quadrature du cercle. La réalité de ce Nouvel Âge est que la qualité n'a jamais été aussi importante.
La feuille de route vers l'avenir ne se trouve pas dans le rétroviseur de l'agence de réglementation.
Certains radiodiffuseurs comprennent cela. Par exemple, HBO a connu énormément de succès en concevant des séries d'une qualité que l'on trouverait dans une salle de cinéma. Chaque saison comporte moins d'épisodes, mais les histoires ont été ramenées à leurs éléments les plus essentiels afin d'en faire les meilleures séries qui soit. Au cours des dernières années, d'autres ont repris ce modèle, par exemple AMC, Netflix et la BBC. À présent, les réalisateurs de cinéma veulent faire de la télé.

La décision d'aujourd'hui

Aujourd'hui, nous avons annoncé des modifications importantes afin de faire entrer la réglementation du CRTC et la télévision canadienne dans l'ère de l'abondance. Vous pouvez lire notre décision si vous désirez en connaître les détails. Mais je vous préviens : il y a 323 paragraphes, ce qui montre la complexité de simplifier des règles qui ont été adoptées successivement depuis 50 ans. Pour l'instant, je veux m'attarder à trois mesures.
Tout d'abord, nous avons réduit les quotas concernant la quantité d'émissions canadiennes que doivent diffuser les stations de télévision locales et les chaînes spécialisées. Pour les années à venir, nous mettons plutôt l'accent sur les heures de grande écoute en soirée — le moment où les gens regardent encore la télévision. Les quotas à la télévision sont une notion hautement anachronique dans une ère d'abondance et dans un univers où prime le choix.
Deuxièmement, nous avons supprimé les règles qui interdisaient à des chaînes spécialisées, comme HGTV Canada et MusiquePlus, de diffuser certains types d'émissions, essentiellement pour les mêmes raisons.
Enfin, nous avons exigé que tous les radiodiffuseurs investissent financièrement dans les émissions que créent les Canadiens. Car nous voulons que les créateurs et les distributeurs choisissent la qualité plutôt que la quantité.
Une telle approche crée un cycle vertueux où l'industrie investit afin de créer de meilleures émissions, ce qui ajoute à la valeur du système, ce qui génère à son tour plus d'argent à réinvestir dans le contenu que créent les Canadiens. Plus important encore, cela favorise un contexte où les Canadiens veulent regarder le contenu de nos créateurs — non pas parce qu'on les y force, mais parce que c'est du bon contenu – voire de l'excellent contenu!

À la découverte des contenus

Cependant, je sais qu'investir dans les productions canadiennes n'est pas la seule solution pour accroître leur visibilité auprès des auditoires. Il faut faire plus afin que les Canadiens connaissent nos meilleures émissions. Nous pensons aussi à cela. Plus tard cette année, le CRTC organisera un Sommet de la découverte, qui réunira des innovateurs et des chefs de file visionnaires des secteurs public et privé, du Canada et de l'étranger. Les discussions porteront sur la mise au point de solutions techniques liées au défi entourant la découverte de contenu.
Le Sommet a pour but de changer notre vision, rien de moins. Il vise à susciter de nouvelles façons de penser par rapport aux outils et aux méthodes qui permettront de mettre les téléspectateurs en relation avec le contenu qu'ils désirent, en cette ère d'abondance caractérisée par la fragmentation et les micromarchés.
Au fait, il ne s'agit pas ici de réinventer la roue. Les grandes entreprises en ligne, comme Amazon et Netflix, utilisent la technologie numérique tous les jours pour faire cela. Ils utilisent des algorithmes complexes afin de recommander du contenu que vous devriez apprécier : des électroménagers, des films ou des livres. Mais pour la télévision, c'est un changement de mentalité important.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, traditionnellement, les radiodiffuseurs ont été détenteurs du contenu. Ils ont créé des liens entre les créateurs et les téléspectateurs, et ont dicté le moment et la manière de diffuser une émission. Cependant, la technologie à large bande a fait en sorte que leur rôle est moins important. Certainement, ils donnent rendez-vous aux téléspectateurs pour voir du contenu en temps réel, par exemple les nouvelles, les sports, les émissions de téléréalité, les concours de talent en direct et la couverture électorale.
Mais comme les gens peuvent désormais choisir le moment et l'endroit pour visionner du contenu, les radiodiffuseurs ne continueront pas à jouer un rôle aussi crucial pour ce qui est de faire le pont entre les auditoires et les créateurs de contenu. Dans le paysage médiatique de l'avenir, les radiodiffuseurs perdent leur rôle d'intermédiaire. Conséquemment, les créateurs devront travailler plus que jamais pour joindre les téléspectateurs. Après tout, à quoi bon créer le meilleur contenu au monde si personne ne peut le trouver et l'apprécier. La découverte importe plus que tout.
En particulier, nous voulons que les Canadiens puissent trouver le contenu que créent les Canadiens. Chaque année, des milliards de dollars sont investis dans la création d'émissions canadiennes. Toute société doit investir ainsi dans les arts, y compris les films et les émissions de télévision. Ceux-ci permettent une réflexion sur notre identité et sur la direction dans laquelle est engagé notre pays. Mais si les Canadiens ne peuvent pas trouver ces créations, alors inévitablement celles-ci perdent leur valeur propre et commerciale. Les émissions canadiennes sont excellentes mais elles doivent être plus. Elles doivent pouvoir être trouvées.
Le Sommet sur la découverte contribuera à mettre en relation le contenu que créent des Canadiens avec les Canadiens eux-mêmes et le reste du monde, de façon à ce que ce contenu et ses créateurs puissent prendre leur place aux palmarès planétaires.

Créer du contenu pour la scène internationale

Certains pourraient rechigner à l'idée que les émissions canadiennes sont en mesure d'atteindre les mêmes sommets que les émissions créées dans d'autres grands marchés du monde. Pas moi. Je sais qu'elles peuvent réussir. Il n'y a aucune raison de penser que nos productions télévisuelles ne peuvent pas gravir les plus hauts sommets, comme l'ont fait des musiciens tels Drake, Arcade Fire ou Cœur de pirate et Alex Nevsky. Elles le peuvent, à la condition que le cadre au sein duquel elles évoluent change et soit moins rigide. Au cours des dernières années, à l'échelle planétaire, nous avons été le deuxième ou troisième exportateur de talents musicaux. Nous pouvons faire de même en télévision.
Peut-être avez-vous entendu parler de l'émission The Code, la plus récente émission de suspense à saveur politique à faire son entrée en ondes. Cela vient d'Australie et c'est excellent. Downton Abbey est une production tout aussi brillante, produite au Royaume-Uni. Borgen et The Killing ont fait connaître le Danemark au monde entier. Vous noterez qu'aucune de ces productions ne vient des États-Unis, car il n'est pas dit que le vrai bon contenu doit toujours venir de nos voisins du sud. Il peut se faire à Canberra, à Londres, à Copenhague ou ici-même à Ottawa.
Si les Britanniques, les Australiens et les Danois sont en mesure de créer des émissions et des films pour la télévision d'envergure internationale, pourquoi cela ne serait-il pas notre cas? Qu'est-ce qui a empêché les Canadiens de transformer L'Histoire de Pi et Le Patient anglais — deux romans écrits par des auteurs canadiens de classe mondiale dont on applaudit le travail partout sur la planète — en productions canadiennes?
Ce n'était pas le manque d'acteurs et de créateurs talentueux, ni même l'accès à d'excellents studios d'enregistrement. Tout cela abonde au Canada. La récente édition des prix Écrans canadiens a montré que nous possédons un vaste bassin de gens talentueux, qu'il s'agisse des réalisateurs, des acteurs, des « show runners » ou des scénaristes. Je salue leurs réussites.
On ne peut imputer tout cela à l'effritement de la valeur du dollar. Les producteurs d'Hollywood ont fait des tournages au Canada même lorsque notre dollar était à parité avec le billet vert.
Ce n'est même pas un manque d'argent dans le système.
Nous pouvons puiser dans une matière riche qui est la nôtre. Yann Martel et Michael Ondaatje sont loin d'être les seuls auteurs canadiens à avoir écrit des meilleurs vendeurs absolument mémorables.
Il y a aussi Margaret Atwood, Yves Beauchemin, Pierre Berton, Joseph Boyden, Eleanor Catton, Lynn Coady, Arlette Cousture, Michael Crummey, Michael Delisle, Alain Farah, Bill Gaston, Lawrence Hill, Frances Itani, Thomas King, Robert Lalonde, Stephen Leacock, Roger Lemelin, Missy Marston, Stuart McLean, Margaret McMillan, Andrée Michaud, Rohinton Mistry, Wajdi Mouawad, Alice Munro, Fred Pellerin, Andrew Pyper, David Adams Richard, Claire Holden Rothman, Gabrielle Roy, Raziel Reid, Bill Richardson, Mordecai Richler, Jocelyne Saucier, Carol Shields, Joan Thomas, Kim Thuy, Miriam Toews, Larry Tremblay, Jane Urquhart…
Plusieurs autres noms pourraient être ajoutés à la liste. Je me suis seulement arrêté car j'avais besoin de reprendre mon souffle. L'idée est celle-ci : le Canada possède des écrivains remarquables reconnus internationalement.
De plus, notre histoire militaire, politique et sociale est un terreau fertile pour de nouveaux récits et de nouveaux documentaires, qui permettraient d'enrichir notre sens d'identité commune.
Une partie du problème réside dans la réglementation. Et au CRTC, nous assumons notre part du blâme. Les organismes de réglementation et les gens responsables de la certification du contenu créé par les Canadiens s'empêtrent souvent dans les détails d'une production avant de décider d'accorder le financement. Nous fondons nos décisions sur des règles de certification dont l'ADN remonte à la Conférence impériale de 1926.
Qu'est-ce que ça change si le tigre dans L'Histoire de Pi n'est pas canadien? Ou si le roman ne se déroule pas sur le fleuve Saint-Laurent? Évidemment, absolument rien. Que l'histoire soit le fruit du brillant travail d'un Canadien, dont les réalisations ont été célébrées partout dans le monde, dont le point de vue sur le monde est Canadien, voilà ce qui compte.
Des Canadiens dont le talent est de calibre mondial sont présents ici au Canada et à Hollywood. De fait, selon certaines évaluations, il y a plus de 100 000 Canadiens qui travaillent à Los Angeles en tant qu'acteurs, comédiens, réalisateurs et producteurs ou qui assument d'autres rôles liés à la création, à la technique et aux affaires. Il y a quelques semaines, deux d'entre eux sont repartis avec un Oscar.
Tant et aussi longtemps que l'histoire est racontée par un Canadien, trouvons les personnes les plus talentueuses pour y travailler et réalisons une œuvre qui va conquérir le monde. Oubliez la signature « créé au Canada ». Nous voulons du contenu qui est créé PAR le Canada.
Voilà pourquoi nous utilisons deux projets pilotes afin de redéfinir les productions canadiennes. Nous voulons faciliter les choses pour le prochain grand roman canadien afin qu'il puisse devenir le prochain grand film canadien ou la prochaine grande mini-série canadienne à la télévision. Mais nous n'y arriverons pas seuls. D'autres responsables du financement et de la certification doivent changer leur façon de voir les choses.
L'autre partie du problème réside dans le manque d'innovation. Les radiodiffuseurs et les producteurs indépendants doivent dépenser davantage afin de créer un contenu de meilleure qualité. Ils doivent mettre l'accent sur la qualité plutôt que sur la quantité. De plus, ils doivent allouer une plus grande partie de l'argent habituellement réservé à la production pour la promotion. Nous les mettons au défi de faire ces deux choses afin que les auditoires canadiens et étrangers apprennent à connaître leurs productions et veulent les regarder.

Préparer l'avenir

Nous laissons aller les vestiges du passé — les quotas, la protection du genre, le critère de certification — afin de permettre à notre système de télévision de saisir l'avenir, et nous le faisons en toute confiance.
L'ère de l'abondance est arrivée et nous entendons relever les défis qui y sont associés en position de force. Nous avons l'argent dans notre système pour créer et promouvoir d'excellents programmes : nous avons des gens talentueux pour concrétiser ces émissions; et nous avons des téléspectateurs qui veulent du contenu novateur. Et comme l'ont montré les récents Jeux olympiques et paralympiques d'hiver, le Canada possède la passion nécessaire pour monter sur le podium.
À des degrés divers, la télévision canadienne a réussi dans un contexte nord-américain très difficile. Nous avons connu des succès d'envergure internationale avec des émissions comme Orphan Black, Vikings and Degrassi; mais il nous reste à forger une image de marque canadienne durable, associée à la victoire, prête à faire concurrence pour l'emporter.
Nous sommes à la croisée des chemins. Nous pouvons choisir le statu quo dont l'élément central est une vision de la télévision essentiellement linéaire. Cette voie est connue, elle est éprouvée, mais elle ne nous prépare pas pour un avenir incontournable, un avenir qui est entièrement axé sur le téléspectateur.
La deuxième voie est moins connue. Pour certains, elle inspire donc la crainte. À certains égards, elle est imprévisible. Mais son caractère perturbateur peut en faire un haut lieu de créativité, un milieu original où triomphent les véritables entrepreneurs et innovateurs. Le CRTC a choisi de s'engager sur cette voie.
Notre décision en janvier dernier était la première étape dans cette direction. Je serai honnête : elle n'a pas fait l'unanimité. Certains nous ont dit qu'elle n'allait pas assez loin, et d'autres le contraire. Nous accueillons ces critiques en toute sérénité. Si nos décisions réjouissaient toujours les joueurs de l'industrie que nous réglementons, nous n'accomplirions pas notre travail — soit servir l'intérêt public, plutôt que leurs intérêts privés.
Au cours des prochaines semaines, nous annoncerons deux autres décisions dans la foulée de notre conversation Parlons télé.
Si vous entendez des critiques au sujet de nos décisions, posez-vous la question suivante : les arguments que ces critiques mettent de l'avant sont-ils favorables à l'intérêt public ou trouvent-ils plutôt leur source dans un sentiment imprégné de droits acquis, et enrobés d'une telle façon qu'on croirait qu'ils s'appuient sur l'intérêt public?
Cette ville est remplie de lobbyistes dont le travail consiste à présenter les intérêts de leurs clients sous un jour favorable, à se draper, pour ainsi dire, de la feuille d'érable, et à parler de la Colline parlementaire en affichant un air de stupeur et de consternation.
Je respecte leur droit d'agir ainsi, mais je respecte davantage les droits, les attentes et les souhaits des Canadiens que nous servons.

Conclusion

Les changements que nous apportons ne seront pas faciles à accepter pour tous. Certains connaîtront des accrocs. Le succès ne sera pas l'affaire de tous. Certains vont prospérer, d'autres vont échouer. De nouveaux joueurs vont apparaître. Mais je peux vous assurer que c'est le bon chemin vers l'avant. Nous devons tous nous imposer le défi du changement. Et je ne parle pas seulement des créateurs, des producteurs et des radiodiffuseurs. Le CRTC, les responsables des politiques et les organismes de financement doivent aussi épouser le changement et saisir les nouvelles occasions.
Comme l'a évoqué John F. Kennedy, nous ne faisons pas cela car ce sera facile et dépourvu d'obstacles. Même si ce sera difficile, nous devons aller dans cette direction. Le monde évolue et nous devons nous préparer pour l'avenir avant qu'il ne soit trop tard.
Rappelez-vous, comme c'est souvent le cas avec le changement, que « cela paraît toujours impossible, jusqu'à ce que cela devienne réalité ».
Merci.

Source : http://nouvelles.gc.ca/web/article-fr.do?nid=947239